Stéphane Cognon a écrit " Je reviens d'un long voyage", un petit livre de 120 pages où il raconte la manière dont il a traversé la maladie quand il avait une vingtaine d'années. La rencontre avec sa psychiatre, les rapports avec ses parents ou encore sa vie actuelle... Il délivre un message d'optimisme bienveillant.
Votre livre s'appelle "Je reviens d'un long voyage". D'où vient ce titre ?
Le titre du manuscrit était au départ « Grain de folie ». Quant au sous-titre, c’est Béatrice Borrel, la présidente de l’Unafam, qui en a eu l’idée. Quand elle a lu le manuscrit et qu’on lui a proposé de faire la préface, elle a dit : « Mais c’est vraiment Candide au pays des schizophrènes. » J’ai trouvé qu’elle avait bien fait le tour de l’esprit du livre.
Pourquoi avoir écrit ce livre maintenant ?
Tout cela c’est derrière moi, j’ai une femme et trois enfants, je n’ai plus aucun symptôme de la maladie depuis vingt-cinq ans. Je prends un médicament tous les matins, un comprimé, je me rase et je pars au boulot. Je suis stabilisé. On parle de rémission, pas de guérison mais je me sens guéri. Je ne pense pas que j’aurais pu l’écrire plus tôt, cette partie de ma vie est derrière moi.Vous dîtes avoir eu beaucoup de chance, entre autres, avec la rencontre avec votre psychiatre ?
Oui, toutes les planètes se sont alignées. Au moment où j’ai eu cette crise, à vingt ans, ma sœur, qui était interne en médecine, avait écouté une conférence d’une psychiatre qui parlait de schizophrénie. Elle a fait le rapprochement et m’a amené dans le service de cette psychiatre, qui m’a reçu tout de suite, m’a immédiatement donné le bon médicament. Ensuite j’ai fait trois mois à l’hôpital. Au bout de ces trois mois, je suis sorti de l’hôpital. J’ai eu un an pour me remettre, difficile, avec les chamboulements dans le cerveau et la fatigue. Puis j’ai repassé mon bac et je l’ai eu.
Que vous a apporté votre maladie ?
Ma maladie ne m’a pas apporté grand-chose en dehors du fait que j’ai vu ma psychiatre qui m’a aidé à traverser les moments durs. Elle m’a apporté une fragilité, c’est indéniable. Si je ne prends pas de médicaments, j’ai des crises. Ce sont les échanges avec ma psy qui m’ont apporté des éléments pour ma personnalité et ma façon d’aborder les choses. Le fait que ce soit arrivé tôt, à vingt ans, je m’en serais bien passé, mais cela m’a fait me connaître plus tôt, à faire attention à ce qu’il faut faire et ne pas faire. C’est salvateur. La maladie est une fragilité mais c’est tout le parcours. A 50 ans, je sais gérer ma vie. C’est cela qui m’a construit et qui est positif.
Dans votre livre, vous parlez peu de vos parents...
Pour mes parents, cela a été un choc. Le fait que je me sois rétabli assez rapidement et plus facilement que d’autres personnes fait que nous n’avons plus parlé de la maladie du tout. C’était un accident de vie. Comme c’était douloureux, autant ne pas en parler. Il se trouve que j’ai écrit mon livre. Quand il est paru, ils ont eu du mal mais ils l’ont lu. Mon père, qui est très pudique, m’a aidé dans ma carrière professionnelle, il m’a donné un sacré coup de pouce. Quand je ne savais pas trop quoi faire, il m’a dit ; « Allez Stéphane, tu vas aller sur les chantiers ! » un peu avant 25 ans. Cela m’a aidé, je me suis trouvé enfin utile à des gens qui ne m’ont pas fait forcément de cadeaux. Cela m’a plu, je travaille toujours dans la même entreprise où j’ai fait plusieurs métiers. On n’a jamais parlé de la maladie ensemble, j’en ai parlé un peu avec ma mère mais jamais avec lui. Quand le livre a paru, mon père m’a envoyé un mail dans lequel il parlait d’autre chose mais à la fin, il m’a félicité pour le livre, la manière dont j’avais abordé le sujet. Cela m’a suffi.