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Lucas a 21 ans. Il souffre d’une schizophrénie depuis l’âge de 12 ans qui lui a causé bien des tourments. Malgré ses difficultés, il a connu un parcours réussi et en témoigne pour encourager tous ceux qui sont confrontés à la même maladie..

Quand avez-vous commencé à éprouver des troubles ? Qu’est-ce-que vous avez ressenti alors  ?

J’étais en 5e, au collège, quand j’ai commencé à ressentir de très grosses crises d’angoisse, accompagnées de crises de tétanie, telles que je n’arrivais plus à marcher. J’étais très jeune, je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. J’ai été absent la moitié de l’année scolaire. Ces angoisses ont repris le dessus en classe de 3ème, puis en classe de 1ère, et depuis elles ne se sont plus arrêtées. J’avais le moral à zéro, je n’avais plus envie de vivre.

J’ai fait toute une batterie d’examens, IRM etc. mais rien n’en est sorti. J’étais soigné à l’homéopathie pour diminuer les angoisses et retrouver le sommeil. Ça a été très difficile notamment l’année du bac, je voulais réussir mais j’étais très stressé par les oraux. Au moment des examens je passais mes soirées couché sur le canapé à ne rien faire. Je ne pouvais plus rien faire. Ça a encore empiré après le bac. J’aurais dû fêter ça avec les autres mais je passais ma journée couché.

J’étais désespéré et j’en ai parlé à ma mère qui m’a fait consulter un psychiatre. J’ai été interné une première fois, j’avais alors 16 ans, un peu « cachetonné » pour calmer mes angoisses. On m’a fait faire aussi de la méditation pleine conscience. Puis je suis parti en vacances en famille mais j’avais encore des angoisses. J’ai fréquenté l’hôpital de jour le reste des vacances scolaires.
 

Comment s’est passé la suite pour vous  ?

Je me suis inscrit dans une école d’ingénieurs proche de chez moi. Je réussissais bien ; mais j’avais encore beaucoup d’angoisses. Le bizutage, les moqueries me faisaient beaucoup souffrir. Je pouvais en parler avec l’infirmier de l’école. A la fin de la 2ème année de l’école j’étais admis en 3ème année mais j’ai connu une nouvelle crise durant l’été. J’ai été hospitalisé durant plusieurs semaines.

Le soir de la rentrée, je me suis effondré, j’avais envie de mourir. J’ai été à nouveau hospitalisé et pendant 2 ans j’ai fait des allers retours à l’hôpital pendant 3 ou 4 semaines. C’était l’enfer. Je fréquentais l’hôpital de jour où ma mère m’emmenait tous les matins mais je n’arrivais plus à rien faire. Je regardais la télé sans vraiment la regarder. Je dormais beaucoup. Je vivais un peu comme un fantôme, sans but, sans plaisir.


Comment votre entourage a-t-il réagi à ces troubles  ?

Uniquement ma mère et mon beau père sont au courant, ma mère l'a assez rapidement compris mais ça a été plus dur pour mon beau père. Que je doive prendre des médicaments a été dur pour eux ; ils avaient un peu peur.

Quand ils ont su ce qui m’arrivait, ils ont tous les deux suivi le programme Profamille. Ils comprenaient mieux ce qui se passait et sont devenus très aidants. Ils m’ont beaucoup soutenu. Cela les a vraiment fait changer, c’est super.

J'ai côtoyé la même bande de potes depuis la 5e, et après ma seconde hospitalisation plus aucune nouvelle et aujourd'hui je n'en ai plus vraiment.


Qu’est-ce qui vous a aidé aussi  ?

J’avais une jeune psychiatre avec qui je parlais beaucoup. Je la voyais souvent, cela me faisait beaucoup de bien. Puis elle a fait une dépression, et j’ai changé de psychiatre. J’ai eu aussi de très bons contacts avec une jeune psychologue remplaçante au CMP de Belfort. Je les remercie toutes les deux ; elles m’ont fait énormément de bien. J’y retourne d’ailleurs assez souvent pour voir les soignants, rassurer les patients, leur montrer qu’on peut vivre en gérant ses angoisses.


Comment allez-vous aujourd’hui  ?

Après ces deux années d’aller-retour à l’hôpital ça allait mieux, j’ai fini par m’en sortir. On a déposé une demande auprès de la MDPH pour que je puisse bénéficier de l’AAH et travailler en Esat. J’avais le potentiel pour reprendre mes études mais j’en avais marre du stress. En Esat j’ai des horaires compatibles avec une vie de famille, je m’entends bien avec les autres, je rigole bien. Je n’ai plus aucune pression.

Je suis aux espaces verts en ESAT et j'aime ça, on travaille dehors, on apprend à s'occuper des haies, jardins etc. et surtout on a un rythme de vie. Je ne gagne pas beaucoup plus qu’avec l'AAH quand je ne travaillais pas, mais simplement un rythme de vie est essentiel, et puis voir du monde, ses collègues etc. c'est vraiment bien même si ce n'est pas facile tous les jours !


Pour quelles raisons avez-vous souhaité témoigner de votre maladie  ?

La première raison est l'envie de dire au monde entier que la schizophrénie n'est pas synonyme de tueur en série. Par exemple moi qui ai cette pathologie je ne tue même pas les insectes, je ne me suis jamais battu. Une fois qu'on m'a annoncé une schizophrénie c'était fou je me disais « Mince je vais tuer ceux que j'aime etc. » et en fait, non.

 

Quels conseils auriez-vous envie de donner aux jeunes confrontés aux schizophrénies ?  ?

Ne jamais perdre espoir, avoir confiance en l'avenir. Il y aura toujours un moment, une phase comme un traitement bien dosé. Pour ma part ça a duré très longtemps, j'ai raté pas mal de choses au niveau social et voilà, même avec cette pathologie, j'ai eu mon Bac mention bien, mention européenne et Latin-grec (j'avais 9h de cours par jour),  j'ai aussi réussi un concours d'ingénieur à 17 ans.

Donc de ce côté, il n’y a pas de problèmes, si on veut y arriver on y arrivera ; il faut vraiment croire en l'avenir mais surtout en soi. En fait, j'ai tellement souffert, j'étais si jeune, je ne comprenais pas ce qui m'arrivait mais j'ai quand même un bon parcours dont je suis fier. Et maintenant que je me sens mieux, effectivement j'aimerais témoigner, dire à toutes ces personnes que l'on peut avoir une belle vie, que l'on peut faire ce que l'on veut, et que nous sommes même plus forts que les autres puisque nous vivons tous à un moment des moments horribles. On se forme une carapace comme on dit.

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